Contrat d'édition


Bonne nouvelle, votre projet intéresse sérieusement un éditeur et il souhaite publier votre future Bande Dessinée. Il va donc falloir parler contrat d'édition et vous angoissez, pas de panique, avec un peu d'aide, vous vous en sortirez à la perfection.

La règle d'or pour de bonnes négociations : pas de précipitation !
Même si vous êtes dans une période difficile financièrement, n'oubliez pas qu'un contrat d'édition vous engage souvent jusqu'à 70 ans après votre mort. Ça vaut donc la peine d'y réfléchir calmement.

Avant toute chose, il est utile de lire Le contrat dont vous êtes le héros.
C'est un petit document d'introduction très instructif et amusant, réalisé par La Charte des auteurs et des illustrateurs jeunesses.

Première étape : Combien ? Et pour quand ?

Généralement, les premières discussions avec l'éditeur/éditrice porteront sur le montant des avances sur droit et sur le délai de réalisation. Bien souvent, ces discussions se font par téléphone ou lors d'un rendez-vous, pour ne pas regretter vos choix, ne donnez jamais votre accord oralement. En cas de doute, deux possibilités : soit vous lui demandez de vous envoyer par mail ce qu'il vient de vous proposer oralement, soit vous utilisez la phrase magique qui vous sortira de toutes les situations pénibles : "C'est noté, je vais y réfléchir et je vous recontacte par mail." Vous pourrez ainsi repenser sereinement à votre conversation avec l'éditeur/éditrice, faire vos comptes pour voir si le montant proposé vous permettra de vivre au quotidien, consulter votre entourage ou d'autres auteur/rices pour avoir des avis expérimentés et enfin, revenir vers lui avec une décision.

A titre d'information réel : le montant des avances sur droits varient énormément selon les auteur/rices et les éditeurs. Pour un 54 pages couleurs, il peut être de 15 000, 20 000, 30 000 euros et bien plus, selon votre notoriété et vos talents de négociateur.
Si vous signez avec un "petit" éditeur qui n'a pas de moyen, assurez vous que votre pourcentage sur les ventes est plus élevé que les 8% habituels !


Deuxième étape : la lecture du contrat



Une fois d'accord sur le montant des avances et le délai de réalisation, certain/es auteur/rices pensent que les négociations sont terminées. L'éditeur/éditrice envoie le contrat imprimé et il ne reste plus qu'à le signer. C'est une erreur ! L'accord sur le montant et le délai n'est qu'un premier pas. Les avances sur droit que vous venez de négocier sont récupérables sur les ventes de votre album, elles dépendent donc de nombreuses clauses contractuelles qu'il faut lire avec attention.
Si l'éditeur/éditrice ne le propose pas de lui-même, demandez à voir une version numérique du contrat pour lecture. Vous pourrez ainsi le lire à votre aise, poser des questions et négocier ce qui ne vous convient pas (c'est toujours plus facile à faire qu'avec une version imprimée entre les mains !).

Vous avez donc un beau contrat PDF sur votre ordinateur et vous pouvez commencer à le lire. Problème, c'est un vrai charabia juridique de 20 pages, vous n'y comprenez rien et vous avez horreur de la paperasse ! Respirez un bon coup, vous n'êtes pas seul/e.



Le contrat commenté, réalisé par le SNAC Bande Dessinée, est aujourd'hui le meilleur outil pour comprendre un contrat d'édition de Bande Dessinée*.


Toutefois, seuls les plus acharné/es parviendront à lire les 196 pages entièrement. Document juridique oblige, c'est un sacré pavé de textes relativement indigeste. Il y a trop d'informations, trop de détails et il est impossible de tout retenir en le lisant comme on lit un roman. Heureusement, c'est un document particulièrement pratique à consulter. Pour cela, voici nos quelques conseils :

- Imprimez le document (en mettant deux pages par feuilles, vous en avez donc pour 98 pages). Il sera beaucoup plus facile à consulter, et si vous êtes bien décidé à faire carrière dans la Bande Dessinée, il vous servira plus d'une fois !
- Ne le lisez pas en un seul coup, parcourez rapidement le sommaire et le lexique de fin, puis lisez votre propre contrat à côté (sauf bien sûr, si vous êtes passionné/e par le jargon juridique).
- Dés que vous avez un doute ou une incompréhension à la lecture de votre propre contrat, jetez un œil au sommaire du contrat commenté, allez à la rubrique correspondante et vous trouverez généralement une réponse à votre question.
- Laissez passer une nuit, voir deux, puis recommencez l'opération, feuilletez tranquillement le contrat commenté, peut-être que certaines rubriques attireront votre curiosité.

Si le contrat commenté ne répond pas à toutes vos questions, vous pouvez également vous adressez au service juridique de la SCAM, si vous en êtes membres.


*Attention, le SNAC Bande Dessinée est un syndicat français, certains points du contrat commenté se réfèrent donc à la législation française et non belge.


Troisième étape : les contre-propositions

Après quelques jours dans la peau d'un petit juriste, vous avez finalement terminé. Bravo ! Le plus dur est passé ! Si vous voulez modifier certaines clauses, ou faire des contre-propositions, il ne vous reste plus qu'à en parler avec votre éditeur/éditrice.
Pour ça, ne stressez pas, généralement discuter sur un contrat est une preuve de professionnalisme. N'ayez pas peur de "déranger" ou "d'ennuyer" votre éditeur/éditrice, au contraire, cela montre votre sérieux.
Évidemment, votre éditeur/éditrice n'acceptera pas de tout modifier, certains points ne bougeront pas, d'autres si. A vous de fixer vos priorités, d'éventuellement abandonner une clause pour pouvoir insister sur une autre.

En réalité et bien que les éditeurs présentent le contraire, un contrat n'est JAMAIS gravé dans le marbre, TOUT est absolument négociable.

La négociation dépendra évidemment de votre expérience, de votre notoriété, ainsi que de l'éditeur/éditrice avec qui vous négociez. Les premiers contrats d'une carrière sont généralement les moins bons, assurez-vous toutefois de ne pas accepter des conditions qui nuiront à votre futur. Si la négociation se passe bien, vous signerez votre contrat en étant fier/ère de vous jusqu'au bout, si elle se passe mal et que les rapports ne sont pas du tout bon avec l'éditeur/éditrice, peut-être n'est-il simplement pas quelqu'un de correct et qu'il vaut mieux passer votre chemin...

N'oublions pas que les éditeurs ont toujours besoin de bons projets et de bon.ne.s auteurices !


Pour aller plus loin : quelques liens supplémentaires


Illustrations : Augustin Lebon